JennyNdindir est jeune reporter, ancien enfant reporter à Kinshasa.

Je voudrais partager avec tous les lecteurs quelques faits malheureux que les jeunes filles vivent au quotidien, du fait de la survenance des règles menstruelles. Je le fais avec l’espoir que, de là où vous êtes, vous ne manquerez pas de poser un acte en leur faveur.

Les menstruations, un moment de notre vie où tout s’arrête

A Kinshasa, dans la commune de Makala et précisément où j’habite, dans le quartier M’Fidi, la majorité de filles qui sont en période de règles menstruelles se voient écartées et contraintes de ne pas utiliser les mêmes installations sanitaires que les autres enfants, sous prétexte qu’elles abîmeraient les latrines. Pour celles qui sont scolarisées, ce calvaire se poursuit même à l’école. En effet, dans la quasi-totalité des écoles de mon quartier, il n’y a qu’une seule installation sanitaire commune pour les filles et les garçons. Je vous laisse deviner alors les souffrances psychologiques qu’endurons mes amies et moi-même, lorsque approche la période des règles menstruelles. Pour ne pas passer pour ridicules, on feint souvent d’être malades.

Lorsqu’on échange avec les autres filles, on apprend même qu’il y en a certaines auxquelles est interdit l’usage commun des robinets lorsqu’elles sont en période des menstruations car « elles vont souiller l’eau, ne fût-ce qu’en la touchant ». La période des règles menstruelles s’apparente à un moment de notre vie où tout s’arrête. Qu’on le veuille ou pas, on est obligées de s’écarter, de s’isoler de tous ! Telles des parias, les menstrues nous font paraître pour des personnes ayant commis un péché pour lequel le pardon ne vient que lorsqu’elles seront passées. Notre fardeau n’est déposé qu’au bout de ces 5 à 7 jours. Cela paraît plus interminable qu’un mois de 30 jours, tant l’effort mental à fournir est important.

Un manque d’accès aux protections hygiéniques : un risque pour l’avenir

Par ailleurs, la situation financière de nombreux parents n’arrange pas les choses. Les filles ne peuvent même pas trouver de quoi acheter des serviettes hygiéniques appropriées, dont le paquet qu’on utilise chaque mois coûte 1$ dollar américain. Elles utilisent alors des tissus parfois usés, en ignorant totalement les risques auxquels elles s’exposent. Même si elles auraient appris, comme moi durant les cours de biologie, que cela peut provoquer des infections, réduire les capacités de procréation voire conduire à la mort, je me demande si ces filles ont le choix.

En passant, je ne vous surprendrais pas en vous informant que dans notre culture congolaise, lorsqu’une femme ne conçoit pas d’enfant, on attribue facilement cela à la sorcellerie ; oubliant que la mauvaise gestion de l’hygiène menstruelle durant la tendre jeunesse peut être la cause de cette situation malheureuse.

Je suis sûre que ce que vivent les filles de ma commune est aussi vécu par d’autres filles ailleurs en RDC et dans le monde.

La menstruation est importante, c’est la règle !

En lisant la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant, j’ai appris que des engagements avaient été pris pour protéger chaque enfant contre toute forme de violence mentale, contre toute immixtion dans sa vie privée et contre toute discrimination en matière de jouissance des droits. La bonne santé et le développement harmonieux de l’enfant sont garantis dans ce texte ratifié par notre pays depuis 1990.

A l’époque, je n’étais même pas encore née. Je vais bientôt avoir 18 ans, je ne serai plus enfant. Mon vœu, pour mes jeunes sœurs, est que la communauté soit sensibilisée sur le fait que la menstruation est un élément naturel de l’existence humaine. Les croyances culturelles conduisent à la violation des droits de l’Enfant et peuvent traumatiser une fille jusqu’à la fin de sa vie. Il est nécessaire, lors de la construction ou la réhabilitation des écoles, de veiller à mettre des installations hygiéniques séparées pour filles et garçons, et d’y prévoir des kits pour les filles en période de menstruations.

Si vous le faite, je suis sûr que les filles de Makala et d’autres coins du pays, vont vivre aisément et exercer normalement leurs activités au quotidien, même en période des menstruations.

Si vous ne faites rien, soyez sûr qu’elles vont continuer à grandir sans la moindre assurance et confiance en elles. Est-ce cela que vous voulez ?

La gestion de l’hygiène menstruelle en RDC

L’UNICEF, la Coopération Britannique et Bruxelles Capitale sont engagés aux côtés du gouvernement Congolais pour le financement des activités liées à la gestion de l’hygiène menstruelle. Une étude sur la Gestion de l’hygiène menstruelle en RDC sera bientôt réalisée en vue de l’intégration de cet aspect dans le programme « Villages et Ecoles Assainis ».