JennyNdindir est jeune reporter, ancien enfant reporter à Kinshasa.

Je m’appelle Jenny Ndidir. Je suis Jeune reporter et étudiante à l’Université de Kinshasa. Je suis en 3e année graduat, au département de Gestion des entreprises. Un de mes collègues a été tué par la police de Kinshasa. Attristée, révoltée, j’écris pour porter cette voix qui s’est éteinte. Mais surtout dénoncer les bavures policières. 

 

 

Le samedi 24 juillet, des collègues étudiants de la faculté Sciences de l’Information et la Communication de l’Université de Kinshasa sont allés dans la commune de Selembao accompagnés d’un assistant – donc, un encadreur. L’objectif, c’était de réaliser le tournage d’un film dans le cadre d’un travail pratique.

Capture d'écran de la photo d'Honoré Shama Kwete, l'étudiant qui a été tué. La photo est prise peu avant sa mort au moment du tournage © Archives personnelles

Capture d’écran de la photo d’Honoré Shama Kwete, l’étudiant qui a été tué. La photo est prise peu avant sa mort au moment du tournage © Archives personnelles

 

Une fois sur place, quelques policiers les abordent et les obligent à donner de l’argent comme gage avant d’utiliser le lieu, selon les camarades dont les propos ont été également relayés dans la presse. 

Après leur avoir remis 3 000 Francs congolais, d’autres policiers du même sous-commissariat sont revenus quelques minutes après réclamer encore un peu plus d’argent, selon un témoin cité par Radio France Internationale.  

Déjà, il faut savoir que les étudiants congolais ne reçoivent pas forcément des bourses du gouvernement. Encore moins une bourse de mobilité. Donc la prise en charge transports est personnelle. Je ferme la parenthèse.

Donc, selon les camarades sur place, la police avait décidé de retenir l’assistant qui supervisait le travail de ces étudiants sur terrain. D’autres étudiants sont venus réclamer pour qu’on le relâche.

Furieux, l’un des policiers a tiré une première balle, ensuite une deuxième. Et cette dernière a touché Honoré Shama Kwete, étudiant de G2 SIC, qui est mort sur le coup…

Dans un communiqué, la police ne parle pas de tentatives de corruption, mais ils disent que les agents ont voulu contrôler l’autorisation de tournage. Le sous-commissariat a été incendié.

La fin d’une vie, d’un rêve, d’une ambition, des projets

 

Dessin enfant de Béni réalisé par Exaucé, enfant reporter de Bukavu (@ponabana/exaucé)

 

Ce lundi, les étudiants de l’Université de Kinshasa ont marché en mémoire de leur regretté camarade. Et ça, c’était prévisible. Une manifestation accompagnée de pleurs, de chants, mais pas que… Certains jeunes ont brûlé une partie de l’amphithéâtre de l’Université de Kinshasa pour attirer l’attention des autorités nationales sur cet acte ignoble. Rien ne prouve qu’il n’ y avait que des étudiants.  Du coup, la manifestation s’est transformée en affrontement entre étudiants et policiers. 

Comme toujours, les bavures policières

 

Les policiers ont réagi avec des gaz lacrymogènes et des balles  perdues à l’endroit des étudiants. C’est triste de savoir que dans notre pays, les agents de l’ordre qui sont censés assurer la sécurité de la population, (les étudiants y compris.), deviennent eux-mêmes des ennemis des étudiants.

Il faut croire que les étudiants ne sont ni respectés, ni protégés en RDC. Ils ne peuvent pas faire face aux armes à feu.

Ceci n’est pas la première fois. Les policiers de Kinshasa sont souvent en conflit avec les étudiants de l’Université de Kinshasa.

En tant qu’étudiante de l’UNIKIN, je pense que de tels actes créent en nous une méfiance. Alors une grande méfiance. On se met dans une position d’auto – défense. Normalement, nous sommes censés collaborer avec eux.

 

Attristée, révoltée, j’écris pour porter la voix de cette voix qui s’est éteinte

 

Je suis profondément attristée et déçue de l’agissement de nos policiers. Voir nos amis mourir à balles réelles presque chaque année crée en nous un traumatisme, des frustrations qui pourraient avoir des conséquences négatives sur nos vies et sur l’avenir de notre pays.

L’avenir de notre pays dépend de la jeunesse que nous sommes. Si nous sommes maltraités, incompris, tués, privés du droit à la parole, droit d’avoir une opinion. Alors où allons nous ? Quel genre de jeunes veulent-ils pour l’avenir de ce pays ?

Les étudiants que nous sommes réclament le respect. Du moins, s’il existe encore dans notre pays de la considération, la liberté d’expression et d’opinion, et par-dessus tout, nous voulons étudier dans la paix.