Lina, 10 ans, est enfant reporter à Kinshasa.

 

Je m’appelle Lina. J’ai 10 ans et je suis enfant reporter de Kinshasa. Ma mère a été arrêtée par des rebelles actifs dans l’Est du Congo dans la province du Nord-Kivu. C’était le pire moment de ma vie.

 

 

En fait, ma mère est commerçante. Elle revend à Goma des marchandises qu’elle achète à Kinshasa. À Goma, elle achète des choses à revendre à Kinshasa. Pour elle, ce n’est pas très difficile. Elle est originaire de Goma. Donc les habitants de la ville la considèrent comme leur sœur.

À Goma, elle arrive souvent chez sa mère et ses sœurs. J’ai toujours voulu y aller avec elle, mais elle n’accepte jamais. Quand je demande pourquoi ? Elle m’explique que les enfants de cette province vivent des atrocités qu’elle ne veut pas que je vive. Maman me raconte combien la vie des enfants y est difficile. Elle parle de viol, d’agression et autres atrocités. Les exemples que ma mère me donne me font peur. Elle m’explique qu’elle-même y va malgré elle. Et que si on avait les moyens, elle allait arrêter de faire ces navettes.

 

Maman a failli mourir

Un jour, alors que ma mère était en voyage, elle ne donne plus de ses nouvelles. Cela nous inquiète tous. En fait, dans ses habitudes, elle ne passe pas un jour sans nous appeler quand elle n’est pas là. Donc son silence nous inquiète.
Pendant plusieurs jours, on ne reçoit aucune nouvelle de ma mère. Quand on appelle ma grand-mère pour demander, elle nous dit qu’elle n’a pas de nouvelle non plus. On panique parce qu’on ne sait pas ce qui se passe.

Quelques semaines plus tard, ma mère appelle. On saute tous sur le téléphone.

Au téléphone, maman nous explique qu’elle a été enlevée. Elle a l’air calme, mais on sent que sa voix tremble. Ça me fait peur. Ma mère ne nous raconte pas tout de suite ce qui s’est passé. Elle promet de le faire dès qu’elle sera à Kinshasa.

Une fois à Kinshasa, maman nous raconte qu’elle était capturée par des rebelles. Elle a été enlevée avec ses amies commerçantes. Elles étaient au nombre de six. Les cinq autres ont été violées et tuées. Ma mère est la seule survivante. Quand on lui demande comment ça se fait ? Elle nous répond que c’est un miracle.
« C’est Dieu seulement », commence-t-elle. Elle nous raconte que plutôt que d’être violée et tuée, elle a été conduite devant un colonel avec qui elle a longtemps parlé. Je ne me rappelle plus de leur conversation. Mais visiblement, elle a été marquée.

Après cet incident, ma mère ne veut plus y retourner. Et notre famille a du mal à tenir. En fait, mon père ne gagne pas beaucoup. Et à lui seul, il ne peut pas prendre soin de toute la famille. Le commerce de ma mère aidait beaucoup la maison. Donc, maintenant, je vais parfois à l’école sans manger. J’espère que cela pourra changer cette année.

 

Mon plaidoyer

Je demande aux autorités de renforcer la sécurité dans l’Est du pays pour mieux protéger les femmes et les enfants qui y vivent. À cause des atrocités qui arrivent dans cette zone, certaines femmes comme ma mère sont traumatisées et ne veulent plus s’y rendre. Cela cause des dégâts psychologiques qu’on ne sait pas parfois évaluer.
Heureusement que ma mère est encore en vie. Je compatis à la douleur de ceux qui ont perdu leurs parents à cause des violences et des conflits armés.

 

Encadreur : Josué Bolongo