Enfants reporters de Kinshasa, sont des enfants de moins de 18 ans qui sont engagés dans la promotion des droits de l'enfant en RD Congo.

Il est 4 heures du matin. Ma tante appelle ma mère. Cela est arrivé l’année passée. Je m’en souviens comme si c’était hier. Ma tante annonce à ma mère que ses fils ne sont pas à la maison. Sont-ils morts ? Non. Mais qu’est-ce qui s’est passé ?

 

Ils ont disparu. Probablement kidnappés. Ma tante habite à Bandal. Je suis Gloria, j’ai 12 ans et je suis enfant reporter de Kinshasa.

 

Alors, mes cousins ont disparu et on ne les a plus jamais retrouvés. Et quand ma tante appelle pour le dire à ma mère, il est déjà très tard la nuit. Pour des raisons de sécurité, personne ne peut aller chez elle à cette heure.

 

 

Ils ne voulaient que les enfants

 

Ma tante dit à ma mère que des voleurs sont entrés dans sa maison cette nuit. Ils ont volé des choses ? Non rien en tout cas. Ils n’ont pris que les enfants, ses garçons. Quand ma tante le raconte à ma mère, elle insiste sur le fait que les “ voleurs” n’ont rien pris d’autre. Oui. Rien à part les enfants.

 

« Mes trois enfants ont disparu ». Voilà ce qu’elle a dit à ma mère, au bord des larmes.

En fait, ce soir-là, ma tante est rentrée du travail, fatiguée. Malgré sa fatigue, elle a cuisiné pour ses enfants. Et en allant dormir, elle a oublié de fermer la porte de la maison.

 

Plus tard dans la nuit, elle dit avoir entendu du bruit dans la maison, comme des pas de quelqu’un. Malheureusement, elle n’a pas eu suffisamment de force pour se lever.

 

Lorsqu’elle se réveille le matin, il n’y a plus ses enfants. Elle panique. Elle cherche rapidement dans toute la maison, ses enfants ne sont pas là. C’est à ce moment-là qu’elle remarque avoir laissé la porte ouverte.

 

Selon elle, on l’aurait droguée pour bien voler ses enfants. C’est visiblement à cause des effets de la drogue qu’elle n’a pas pu se lever. Alertés par les pleurs et les cris, les voisins sont venus pour l’aider. Aucune trace d’enfants et tout est intacte dans la maison.

 

Perdus à jamais

 

Après les pleurs, ma tante va déposer une plainte à la police. Des avis de recherche sont lancés dans la ville. Mais cela ne donne rien. Depuis plus d’un an, les enfants ne sont plus rentrés à la maison. Leurs corps n’ont jamais été retrouvés.

 

 

C’est très dur et injuste. Je crois que mes cousins n’ont rien demandé. Et pourquoi on les a emportés ? On les a séparés de force de leur mère. Je me demande si ma tante manque à ses enfants ? Certainement. Ils lui manquent cruellement. Ma tante est devenue comme une folle qui a perdu la tête. Qu’est-ce qui est arrivé à ses enfants ? Pourquoi on les a emportés ? Elle ne cesse de se poser des questions, sans réponse.

 

Pour l’instant, je garde le poids de la disparition de mes cousins. Et ma tante est marquée à jamais par cette disparition. Elle s’en veut terriblement. « C’est la plus grande perte de ma vie », dit-elle toujours. En pleurs.

Depuis, j’ai constamment peur de disparaître, moi aussi.

 

 

Encadreure : Deborah Booto