Likolo Djovani, 14 ans, est enfant reporter à Kinshasa.

Je m’appelle Likolo Djovani, j’ai 14 ans. Je suis enfant reporter de Kinshasa et je vais vous raconter l’histoire de Thérésia*. J’ai modifié le prénom de la fille pour mieux vous raconter cette histoire. Thérésia a 17 ans et habite mon quartier.

Elle ne vit qu’avec sa mère. Je ne sais pas si son père est mort ou s’il est juste parti de la maison. En fait, Thérésia et sa mère n’ont pas une vie aisée. Il leur arrive parfois de demander à manger aux voisins ou de dormir sans manger. Honnêtement, cela ne fait plaisir à personne de vivre dans ces conditions.

« Il faut profiter de ta beauté »

Comme toutes les filles de son âge, Thérésia est entourée d’hommes qui lui font des avances. Pour la convaincre, certains lui font des cadeaux. Au début, Thérésia refusait certains cadeaux et dons. Quelque temps après, elle a commencé à accepter ces différents cadeaux qu’elle ramène parfois à la maison. Elle ramène parfois de la nourriture, des sacs de semoule, etc.
Du coup, la maman encourage sa fille à aller de plus en plus vers les hommes qui peuvent lui donner de l’argent. Visiblement, la mère ne supporte plus ses conditions de vie.
« Il faut profiter de ta beauté », a dit la mère de Thérésia à sa fille. Elle lui explique que lorsqu’on est belle, il faut profiter de sa beauté pour gagner de l’argent. En vérité, elle la pousse à la prostitution.
Des hommes qui ont des moyens font des défilés pour voir Thérésia dans le quartier. Certains viennent avec leurs véhicules pour la fille qui ne refuse presque plus personne. Chaque jour, c’est un homme différent qui la dépose devant la maison. Depuis, leur situation s’est améliorée. Elle n’a pas trouvé un travail qui la paie bien. Sa mère ne travaille pas non plus. Thérésia ne s’habille plus comme avant. Elle s’achète des nouveaux vêtements, des bijoux, etc. Dans le quartier, il arrive que certaines mamans parlent de la vie que mène cette jeune fille. Pour certaines d’entre elles, la maman de Thérésia l’induit en erreur. Une erreur dont sa fille se rendra compte bien tard. Mais personne n’ose lui en parler.
« Quand une jeune fille mène déjà cette vie de quasi-prostitution, elle est difficile à redresser. Elle pense que vous ne pouvez plus rien lui apprendre », a dit une dame, vendeuse de pain au coin de l’avenue. Elle parle à une autre dame dans la rue. À ce moment-là, un autre véhicule venait de déposer Thérésia. Elle porte un haut transparent et une jupe qui ressemble plus à un bout de tissu attaché au bas du corps qu’à un vêtement. J’étais choqué par ce que je voyais.

La prostitution d’enfant est illégale en RDC

En fait, la prostitution d’enfant est une infraction en RDC. La loi congolaise sanctionne la prostitution d’enfant. Je pense qu’on n’en parle pas assez. À mon avis, les autorités devraient suivre de près les activités des enfants dans la rue et sanctionner ceux qui sont poussées à la prostitution par les parents. Sanctionner aussi les parents qui poussent leurs enfants à la prostitution.
Je me dis aussi que cette maman a poussé sa fille à la prostitution à cause des conditions de vie qui sont difficiles. Est-ce que les autorités ne peuvent pas veiller à améliorer les conditions de vie des parents dans les familles ? Ce serait déjà quelque chose de bien. En fait, parfois, le manque d’argent peut pousser certaines personnes à commettre des erreurs ou à induire leurs enfants en erreur.
L’histoire de cette fille m’a touché. Je crois que, le jour où j’aurai le courage, je pourrai voir comment lui parler. Mais je ne sais pas comment elle va réagir. Je vais essayer.
Encadreur : Guy Muzongo