Je veux vous raconter l’histoire d’un enfant de 13 ans que j’ai rencontré. Je vais l’appeler Antoine*. C’est un ancien enfant soldat? Son histoire m’a beaucoup touché. Elle est assez longue et donc, je vais la scinder en deux parties.

Son histoire a quelque chose de surprenant. Pour moi, même enrôlé de force dans les groupes armés, un enfant reste un enfant.
Moi qui vous raconte cette histoire, je suis enfant reporter dans la ville de Bukavu.

Une enfance volée

À seulement 10 ans, Antoine quitte Goma, sa ville natale, dans la province du Nord-Kivu. Il y a des conflits armés dans sa région. Le père de Antoine veut offrir à son enfant un bel avenir et décide d’aller vivre dans un village qui semble calme. La famille reste toujours dans l’est de la RDC. Près d’un an après leur arrivée, les choses tournent mal. La situation se complique pour Antoine.
« En fait, près d’un an après notre arrivée, notre village a été attaqué par des rebelles. Ils ont saisi tous nos biens. Ils ont tué et violé des habitants du village. Il y a eu plusieurs autres atrocités. Je ne peux pas en parler. Ces violences sont inhumaines les unes que les autres. Je n’avais que 11 ans. Je ne savais même pas écrire. Pourtant, j’avais vu des choses qu’un enfant ne devrait jamais voir », se souvient Antoine. Lorsque les rebelles arrivent dans la maison de l’enfant, son père propose de leur offrir son fils pour qu’on lui laisse la vie sauve. Il ne connaît pas le sort de sa mère. « Je suppose qu’elle a été kidnappée ou tuée », raconte avec détachement Antoine. Son regard est vide et il semble ne ressentir aucune émotion. De temps en temps, il y a un éclair de tristesse dans ses yeux.

Peu de femmes dans le camp

En fait, Antoine est capturé par les hommes armés. Dans le camp de ces hommes armés, il est initié au maniement des armes. Cet enfant n’a aucune idée de ce que tout cela implique. Mais il n’a pas de choix. Très vite, on leur fait passer une série d’exercices. Mais comme Antoine est le plus petit, il faut l’endurcir.
« Il n’y avait pas beaucoup de femmes dans le camp. Les femmes qui sont présentes, s’occupent de la cuisine. Les rebelles abusaient d’autres femmes, leur enlevaient la vie puis les jetaient dans la rivière comme des déchets. J’ai aussi été abusé sexuellement. Cela pouvait arriver pendant plusieurs jours successifs. Je ne pouvais rien dire parce que plusieurs hommes étaient tués avant d’ouvrir la bouche. C’était pour moi une chance de vivre après ces abus. Et je ne voulais pas perdre ma vie », raconte Antoine, les yeux baissés. Plus il me parle, j’ai froid dans le dos et des frissons. Je me sens très mal.
J’entends à peine la voix d’Antoine et j’ai le cœur brisé. Au fil du temps, Antoine commence à se droguer pour atténuer ses souffrances. Et comme c’est la coutume dans le camp, les enfants se droguent à plusieurs. Et pendant qu’il est encore sous les effets de la drogue, il pense à son père dont il n’a plus des nouvelles. Il pense aussi à sa mère qu’il aime tant.