Faveur Maniku, 16 ans, est Enfant Reporter de la ville de Kinshasa. Elle a participé au Forum des Filles de la RDC en 2022.

 

Le jeudi 24 octobre 2024, j’ai participé à la conférence nationale pour l’élimination de la violence contre les enfants. L’objectif est de créer un cadre « pour une enfance sans violence ».

 

Je m’appelle Faveur Maniku. J’ai 17 ans et je suis enfant reporter de Kinshasa.
Alors, le jour de la conférence, j’ai appris tellement des choses et je vais vous raconter.

 

RDC, « capitale mondiale du viol » ?

 

Dans la salle où doit se tenir la conférence nationale, tout le monde bouge. Les organisateurs prennent les dernières dispositions pour que la cérémonie soit parfaite. J’entends des gens parler de loin. Je les vois se faire des signes, et se déplacer avec une rapidité incroyable. Visiblement, il faut que tout soit parfait.

Je suis marquée par le commentaire que fait une dame dans la salle.
« Aujourd’hui, la RDC est qualifiée de capitale mondiale du viol », dit-elle. Entendre cela me choque. J’en souffre et je suis indignée d’entendre cela. Chaque fois que j’entends ce genre de phrase, j’ai l’impression d’être surprise et d’apprendre quelque chose de nouveau ou d’avoir longtemps été dans l’ignorance. Même si ce n’est pas le cas.

 

La conférence contre les violences faites à la jeunesse (@ponabana)

 

 

Les violences ne sont pas que physiques

 

Quand on évoque le mot “violence”, les gens font directement référence au viol ou aux violences physiques.

Je sais que ce sont des formes de violence. Mais j’aimerais qu’on sache qu’elles ne sont pas les seules. Il y a des violences qui peuvent aller bien au-delà du corps. J’aimerais qu’on parle de ces violences psychologiques qu’on ignore assez souvent. En fait, je trouve qu’on y accorde moins d’importance. Briser les rêves d’un enfant est une forme de violence. Obliger la fille à vivre avec un homme qu’elle n’a pas choisi est une violence psychologique. Mais on n’en parle pas assez. Il n’y a pas des coups et des blessures visibles. Mais les blessures intérieures laissent des cicatrices autant que les blessures extérieures.

Le pire dans tout ça, c’est de savoir que les enfants subissent la violence sans savoir que cela en est une. Et à cause du poids de la société, ils normalisent la violence. Les enfants victimes de ces violences n’osent même pas en parler.

 

Aujourd’hui, une fille sur cinq, soit 16 % de filles sont exposées au mariage précoce, donc au viol et voient leurs rêves ainsi que leurs vies anéanties. Dans un groupe d’amis de 5 enfants, l’une va voir sa vie changer du jour au lendemain. Une qui ne pourra plus jouer avec les autres, qui ne pourra plus aller à l’école, une qui aura perdu son innocence d’enfant parce que c’est une fille.

En vivant en RDC, la question que je me pose est : est-ce qu’on peut grandir loin de la violence ? Ma question reste sans réponse.

Lorsqu’on parle de la « RDC, capitale mondiale du viol », j’ai l’impression qu’on fait plus allusion à l’Est du pays où les jeunes filles sont victimes d’atrocités et des violences sexuelles. J’aimerais qu’on se rende aussi compte que ce n’est pas qu’à l’Est où les enfants sont victimes de viols. Certains enfants deviennent parfois victimes des gens en qui ils ont confiance dans des espaces où sont censés se sentir en sécurité. Pour parler des violences sexuelles, il n’y a pas que des enfants dans l’Est du pays. Il y a des enfants qui sont victimes des viols dans certaines maisons, écoles, etc.
C’est aussi important d’en parler pour changer les choses.

 

 

A la conférence nationale contre les violences (ponabana)

 

Le gouvernement prend des mesures contre les violences faites à la jeune fille

 

 

Lors de la Conférence nationale contre les violences contre la jeune fille, j’ai appris des différents représentants du gouvernement présents dans la salle, que le gouvernement mène des actions pour lutter contre les différentes violences faites à la jeune fille.

En fait, le gouvernement congolais a mis en place une stratégie basée sur 3 axes : la prévention, la protection et l’accès à la justice pour les victimes de violences. Et une sensibilisation de la population sur la violence. C’est l’un des fondements de l’élimination des violences.

Aujourd’hui, l’État congolais a mis en place l’éducation à la citoyenneté pour enseigner aux jeunes le respect de l’autre et la non-violence.

Pour moi, l’engagement des leaders politiques prouve leur volonté à pallier cette situation, leur volonté à changer les choses et à vouloir un Congo meilleur.

 

Nous devons tous participer au changement

Après différents ateliers organisés lors de la Conférence nationale, les participants ont formulé quelques propositions pour éliminer la violence en RDC. En fait, c’est une question qui concerne tout le monde. Chacun à son niveau peut s’engager à lutter contre la violence faite aux enfants.

Cette journée a été, une journée, très instructive pour moi. Elle m’a permis d’avoir une vision différente des choses et de renouveler mon engagement pour les enfants de la RDC. En apprendre plus sur les violences contre les enfants, a été une nouvelle force, un nouveau départ pour m’engager encore plus pour défendre les droits de l’enfant.

Pour moi, les gens devraient garder à l’esprit que la violence constitue un frein dans le développement d’une personne. Elle rend dépressif et anxieux, détruisant aussi la capacité de reconstruction d’une personne.

Je rêve d’un Congo sans des cœurs et des rêves brisés. Je rêve d’un Congo paisible et sécure pour chaque enfant.

 

Encadreuse : Abigaël Mwabe