Si rien n’est fait, mon amie sera dans la rue. Je vais l’appeler Olga. Mon amie n’est sous la responsabilité de personne. Elle est en Angola. Je m’appelle Choisie Nseka, et je suis jeune encadreuse des enfants reporter.
Olga a 17 ans et elle vit chez sa tante paternelle depuis maintenant deux mois, en Angola. En fait, Olga n’est pas chez sa tante par sa volonté. Et pourtant, ce n’est même pas par plaisir qu’elle y est. Si elle y est, c’est parce qu’elle n’a pas de parents. Quelques mois plus tôt, la tante maternelle chez qui Olga habitait à Kinshasa, lui annonçait un voyage. Elle disait permettre à mon amie d’aller en vacances chez l’une de ses tantes paternelles. Sans son frère. Ce que Olga n’a pas compris, c’est que ces vacances cachaient une toute autre vérité.
Ras-le-bol collectif
En fait, Olga et son frère vivent avec leur tante depuis plusieurs mois. Après le voyage de leur père et le remariage de leur mère, ils vivent comme s’ils n’ont plus de parents. Aucun de leurs deux parents ne prend de leurs nouvelles et personne ne prend soin d’eux. Quelques mois ont suffi pour que leur tante exprime tout haut ce que toute la famille pensait tout bas.
«Ta mère s’est remariée et ne veut pas de vous. Ton père a pris la route. Et pourquoi ce serait à nous de vous héberger ? », me répète mon amie en étouffant un sanglot. Ces paroles sont celles de sa tante. Depuis quelques mois, elle et son frère doivent entendre et supporter ces paroles quotidiennes. Plus tard, Olga s’aperçoit que la réaction de sa tante est le fruit d’un échange tenu en famille.
« Selon les autres membres de la famille, s’occuper de deux enfants non désirés par leurs propres parents est plus qu’un fardeau », me confie Olga. Cette scène-là, je crois qu’elle la revit. Je le sens dans sa voix.
Entre le marteau et l’enclume…
Un soir, je discute avec Olga au téléphone, depuis qu’elle est en Angola, elle m’explique qu’elle doit rentrer d’urgence à Kinshasa. Elle me raconte que sa tante lui a donné un ultimatum. Elle a jusqu’à dimanche pour libérer sa maison. Il ne lui reste que deux jours pour trouver une solution. Ma copine ne sait quoi faire, ni où aller. Elle me rappelle presque en pleurs que ça fait à peine deux mois qu’elle est en Angola, et qu’elle ne connaît personne d’autres que sa tante paternelle. Elle ne parle même pas le portugais, la langue locale.
Inquiète, je décide d’en parler à un ami qui accepte qu’on fasse une cotisation pour Olga. Nous décidons d’aller voir la tante qui vit à Kinshasa et lui remettre l’argent récolté pour acheter le billet de retour de notre amie à Kinshasa. À Olga, nous avons promis de nous cotiser plus souvent pour assurer son bien-être à son retour à Kinshasa. Mais avant, elle doit en parler à son hôte.
Si on la considère comme un enfant propre
Lorsqu’elle parle de son retour, la tante paternelle lui répond qu’il faut une réunion de famille pour décider de qui va l’héberger lorsqu’elle rentre à Kinshasa. Quelques jours plus tard, la réponse tombe. Il n’ y aura pas de retour à Kinshasa pour mon amie. L’ultimatum continue de couler et bientôt, mon amie n’aura bientôt plus d’abri.
En fait, sa tante maternelle, chez qui elle habitait, ne veut plus d’elle. Et la famille de son père n’en veut pas non plus. Olga ne peut qu’accepter sa situation. Elle ne sait plus quoi faire. Lors d’un appel, je profite pour demander si elle avait reçu l’argent pour son billet, envoyé par le canal de sa tante. La réponse ? Je crois que vous la devinez. Elle n’a jamais reçu cet argent. On ne sait pas où il est passé non plus.
Cela dit, Olga devra quitter la maison de sa tante en Angola. Mais, pour aller vivre où ? Mon amie voit sa vie défiler. Chaque jour est un nouveau combat, car elle doit chercher comment se nourrir et subvenir à ses besoins dans un milieu inconnu. Et malheureusement, dans un pays dont elle ne connaît pas la langue et où elle n’a pas de pièce d’identité, mon ami et moi ne pouvons pas l’aider comme il se doit. Tout ce qu’on peut faire, c’est lui parler pour soulager sa peine.
J’espère que la tante pourra changer d’avis pour héberger mon amie. Si seulement elle pouvait la considérer comme son propre enfant.