Sublime Mokuba est une enfant reporter de la ville de Kinshasa.

Je m’appelle sublime Mokuba, j’ai 16 ans et je suis enfant reporter de Kinshasa. Aujourd’hui, j’aimerais vous parler d’une fille de ma classe. Elle m’a un peu choqué, je l’avoue. J’ai du mal à comprendre sa vision des choses. Surtout, sa perception d’elle-même. Elle a décidé de devenir sœur religieuse. Mais pourquoi donc ?

 

 

Echapper au regard des autres

 

Elle m’a dit que c’est la seule issue possible. Elle se sent beaucoup trop moche pour se marier un jour et fonder une famille avec un homme. « Quel homme peut épouser une femme aussi laide que moi ? », m’a-t-elle lancé d’une voix triste. Son sort est scellé à ses yeux.

Je me suis toujours demandé comment une fille, pourtant douce et généreuse, s’est convaincue de n’avoir aucune beauté. Est-ce qu’on se moque d’elle à l’école ou dans son quartier ? Je ne sais pas. Est-ce que des garçons l’ont insultée ?  Peut-être. Je ne crois pas que c’est d’elle-même qu’elle s’est convaincue qu’elle est moche. Ça vient forcément du regard des autres. Dans tous les cas, elle n’a plus cette joie de vivre. Les rapports avec les autres sont plus difficiles, plus complexes. Elle se sent inférieure, sans aucune valeur.

 

Cette maladie du regard des autres

 

Cette fille n’est pas la seule fille en RDC, qui souffre de ce que moi j’appelle la maladie de la différence. Une maladie qui touche le cerveau et t’amène à penser que puisque tu n’entres pas dans les critères de beauté des autres, tu n’es rien, tu ne vaux rien. Les jeunes filles y sont particulièrement exposées. Dans certaines cultures, on leur a appris que seul leur physique a de la valeur. Avoir un visage d’ange, une belle taille, des grosses fesses et des seins droits, voilà ce qui compte. Ton intelligence, ta douceur, ta générosité, rien de tout cela n’a de l’importance.

Certaines sont prêtes à faire de la chirurgie. Elles veulent corriger Dieu. Dans le cas de ma collègue, elle préfère se cacher dans un couvent toute sa vie. C’est vraiment triste. Pour ma part, j’ai essayé de faire comprendre à ma collègue qu’elle est belle comme elle l’est. Personne n’a le droit de lui dire le contraire. Il ne faut pas que le regard des autres l’amène à douter d’elle-même. En me mettant à sa place, je me rends compte que quelle que soit sa force mentale, il est très difficile de se persuader du contraire quand tout le monde te dit que tu es moche. Ce n’est pas facile.

 

 

Il faut en parler

 

Je pense qu’il faut sensibiliser les jeunes sur le vivre-ensemble et l’acceptation de l’autre. Il ne faut pas qu’une personne passe toute sa vie dans l’ombre parce qu’on l’a convaincue qu’elle n’est pas belle. Comme le disait un homme sage, il y a de la beauté en chaque personne. Si vous ne le voyez pas, ce que vous ne regardez pas de la bonne manière.