Merveille a 17 ans et elle étudie en première année à l’Institut Supérieur Pédagogique de la Gombe à Kinshasa. Après plusieurs années d'expériences d’enfant reporter, Merveille s'est lancée dans des études d'histoire, sciences sociales et gestion politique. Son but est de défendre les droits de ses pairs et de venir en aide. Selon elle, “il ne faut pas se limiter au rôle d’enfant reporter mais poursuivre cet engagement pour les enfants dans la vie d’adulte”.

Merveille is 17 years old and is in her first year of university in Kinshasa. After a few years of experience as Child Reporter, Merveille has decided to study History, Social Sciences and Political Management. Her goal is to defend her peers' rights and help. Merveille believes: ‘One must not restrict oneself to the role of being a child reporter, but continue this commitment for children into adult life.’

A l’occasion du 25ème anniversaire de la Convention relative aux Droits de l’Enfants Merveille, une enfant reporter, nous fait partager sa rencontre avec des jeunes filles victimes de violences : c’est pour faire respecter leur intégrité physique, protégé par l’article 34 de la Convention, que l’UNICEF agit.  

Je m’appelle Merveille, j’ai 17 ans et je suis Enfant Reporter de Kinshasa.  Moi et mon amie Victoire, qui est aussi Enfant Reporter de Kinshasa,  sommes allées nous entretenir avec d’autres enfants d’une structure d’encadrement des enfants en situation difficile pour connaître les causes de leur séparation avec leurs familles.

Nous avons rencontré des enfants qui ont été victimes de violences, non seulement dans la rue mais aussi dans leur famille. De toutes les jeunes filles que j’ai rencontrées là-bas, beaucoup viennent de familles où les parents sont divorcés ou encore décédés. Quand les parents divorcent, la vie devient difficile pour l’enfant, comme le témoigne mon amie enfant reporter Victoire, qui vit avec sa maman depuis que ses parents ont divorcé. La plupart des jeunes filles que nous avons rencontrée au centre d’accueil ont subi des maltraitances au sein de leur famille. Elles ont souffert de blessures qui laissent des cicatrices et défauts dans le corps de l’enfant.

Au centre d’accueil des enfants, j’ai rencontré Maria*. Elle a 11 ans. Quand elle avait 3 ans, sa maman est morte. Une année plus tard son père s’est remarié, et à partir de ce moment sa vie a empiré. Sa belle-mère était persuadée qu’elle était un enfant sorcier. Elle l’a écartée de ses propres enfants, puis a commencé à la laisser tout la journée sous le soleil, à l’empêcher de manger, à la frapper à la moindre erreur. Quand Maria a eu 5 ans, elle ne pouvait plus supporter toutes ces douleurs et a donc décidé de fuir sa maison. Elle a passé la nuit au marché pendant deux jours. Peu après, une dame l’a trouvée et lui a indiqué un centre d’accueil pour enfants. Maria y est allée toute seule, à pied, et la route était longue, mais grâce à l’adresse qu’elle avait sur un bout de papier, elle a pu trouver le centre en demandant son chemin.

Elle est restée dans le centre depuis, où elle s’est familiarisée. Elle est entourée des autres jeunes filles et des personnes travaillant dans le centre. Elle fait des activités culturelles, apprend les travaux manuels, mais aussi comment lire, écrire et compter. Quand je l’ai rencontrée, je l’ai trouvée joyeuse, elle aimerait pouvoir être à la maison en famille, mais est heureuse et à l’aise dans le centre, car on ne la frappe pas et qu’elle a pu se faire beaucoup d’amies. Maria n’est pas la seule dans cette situation, elles sont nombreuses à avoir connu une situation difficile, jusqu’à trouver le centre où elles vivent maintenant ensemble.

Peut-être que les parents pensent que c’est une façon d’éduquer les enfants, mais ce n’est pas ça. C’est de la torture.

Tôt ou tard l’enfant pourra avoir un esprit de revanche, peut-être qu’il fera du mal à ses amis, à ses enfants. Cela pourra aller de génération en génération, quand est-ce que cela pourra prendre fin ?

Quand j’étais au centre, j’ai interrogé une des dames qui prend soin des enfants. Je lui demandé comment elle faisait pour redonner leurs esprits aux enfants, faire en sorte qu’ils n’aient plus peur qu’on leur fasse du mal.  Elle m’a répondu que la clé c’était l’affection.

C’est l’affection qui permet aux enfants de se sentir à l’aise. En même temps que l’affection, il y a le dialogue, entre les enfants et avec les personnes qui travaillent au centre.

Le dialogue permet à l’enfant de libérer tout ce qu’il a dans son cœur. Si l’enfant garde tout dans son cœur, il ne peut pas éliminer tout ce qu’il a de mauvais et qui lui fait mal. C’est en parlant avec les autres et en ayant de l’affection que l’enfant se soulage.

Dans le centre, j’ai aussi rencontré Rachel*, qui a 14 ans. Rachel va à l’école, où elle étudie en troisième année. Elle m’a confié que depuis qu’elle vit dans le centre, elle a retrouvé l’espoir dans sa vie. Quand elle était arrivée, elle était désespérée et ne savait plus quoi, car elle vivait hors de sa maison, parce que sa maman était partie et l’avait laissée. Son père ne s’intéressait plus à elle et ne payait plus les frais scolaires. Elle a alors entendu parler du centre, qu’en allant là-bas on pouvait lui payer les frais scolaires pour qu’elle continue l’école. Ca fait maintenant 6 mois qu’elle est dans le centre et qu’elle retourne à l’école. Elle souhaite maintenant retourner chez elle, et les dames du centre vont l’aider à rentrer dans sa famille et convaincre son père de payer ses études. Rachel veut vraiment rentrer à la maison, mais elle est heureuse d’avoir pu continuer l’école grâce au centre.

Ces enfants que nous avons rencontrés ont eu la vie sauve grâce aux différentes actions de cette structure d’encadrement des enfants, de l’implication de l’UNICEF et des efforts  du gouvernement. Nous les félicitons pour cette prise en charge de nos amies, car toutes ces jeunes filles ont retrouvé le sourire, de l’espoir.

Beaucoup d’enfants continuent de subir des violences à ce jour dans la rue, dans leur famille et certaines structures où ils évoluent, par exemple à l’école et autres.

Nous demandons que tous les efforts soient déployés pour que nos familles et tout autre tuteur de l’enfant comprennent que l’enfant n’est pas appelé à être maltraité mais à jouir de tous les droits qui lui sont reconnus pour son développement. Toute personne, là où elle vit, chaque fois qu’elle voit un père ou une mère maltraiter son enfant, doit chercher à interpeller les parents et protéger cet enfant. Nous avons besoin de la protection de tout le monde, de la famille, à l’école, à l’église, dans la rue, partout, pour jouir de nos droits.

* Les noms ont été changés

Contexte            

Les centres d’accueil pour enfants vulnérables bénéficient du soutien de l’Etat congolais à travers la division des affaires sociales, avec l’appui de l’UNICEF. L’UNICEF soutient depuis 2011 l’approche des communautés protectrices, afin que la protection des enfants se fasse non seulement par les structures agréées mais aussi par les membres de la communauté elle-même, facteur de durabilité et d’appropriation de la protection de l’Enfant.

Le rôle principal des communautés protectrices est de contribuer à ce que la communauté protège elle-même les enfants. Toute personne peut devenir membre d’une communauté protectrice. Les membres sont sensibilisés à la protection de l’enfant. Ils sont ainsi à même de référencer les enfants vulnérables et de les diriger vers les structures d’assistance appropriées ; étatiques ou agréées. Les membres cotisent pour mettre en place des projets permettant de financer et développer les communautés protectrices.