Je m’appelle Ntshimbu et je suis âgé de 8 ans. J’étudie en 5e année à l’école primaire MULANGE ; après l’école, le football est mon unique passion. Je n’y joue pas seul mais avec tous mes co-équipiers. Malheureusement nous avons été privés pendant un temps de notre droit de jouer.
Mulange est à 21 km au sud de Kalemie. Ici nous n’avons qu’un seul terrain de jeu aménagé. A chaque fois que nous nous y présentions, les adultes étaient en plein match. Et à chaque fois qu’à notre tour, nous occupions le terrain, ils nous obligeaient à leur laisser la place libre.
Un jour, j’ai osé m’adresser à Mbayo, un vieux que je connaissais pour avoir étudié à l’école secondaire de notre village. Je lui ai simplement demandé de libérer le terrain pour que nous ayons le temps de jouer : cela m’a couté quelques gifles.
C’est ainsi qu’est né une certaine adversité entre les deux groupes : les adultes d’un côté et nous, les enfants, de l’autre. Ce climat a duré longtemps alors que nous étions privés de notre jeu. C’était horrible et inhumain. Personne n’approchait l’autre camp pour demander pardon et régler le problème définitivement. Le fait de nous replier sur nous-même et de nous accrocher à notre orgueil profitait aux adultes et nous plongeait de notre côté dans la solitude.
C’était finalement la loi du plus fort qui s’appliquait. Seuls les adultes pouvaient utiliser le terrain et on en subissait les conséquences, impuissants.
Choqués de cet égoïsme, les enfants reporters de notre école, que l’UNICEF a formé l’année dernière, ont été les premiers à nous dire qu’il était injuste de nous priver de notre droit au jeu. Ils ont alors mené un plaidoyer auprès du chef de localité, qui est l’autorité suprême dans notre village. Grâce aux enfants reporters, nous avons obtenu du chef un programme établi d’occupation de l’aire de jeu !
Désormais, nous pouvons jouer au football dans ce terrain chaque mardi et jeudi. Maintenant nous avons recouvert notre droit au jeu. Nous organisons des matchs amicaux avec des enfants de villages voisins.
En tout cas, les enfants reporters sont pour moi des héros, des humains qui se battent pour le bien-être des autres. Sans eux, nous ne parlerions même plus avec les joueurs de l’équipe des adultes. Si nous nous parlons et nous respectons aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont agi en bien. Ils ont résolu un conflit que personne n’avait osé affronter.
Grâce au football, je profite bien de mes moments de repos en cette rentrée scolaire 2014-2015. Je remets mes pieds sur le ballon rond et un conflit entre nos parents, qui qui avaient appris que nous subissions cette injustice, a été évité.
Seuls les justes savent faire de la justice et les humains de l’humanisme. Les enfants reporters sont aujourd’hui considérés par tout le village comme des justes et des humanistes.
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Traduit du Swahili par Mandela Longa, journaliste encadreur des enfants Reporters.
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Photo : UNICEF RDC 2013 Brett Morton.