Moda Bama, 17 ans, est membre du Comité Urbain d’enfants de la ville de Kinshasa.

© UNICEF DRC Almeras

L’Ecole Primaire Mukasa est une école conventionnée située à Kimbanseke, la commune la plus peuplée de la ville de Kinshasa en République Démocratique du Congo (RDC). Cette école bénéficie de la mesure de gratuite de l’enseignement de base, soulageant ainsi de très nombreux parents, jadis asphyxiés par des frais exorbitants de motivation des enseignants qu’ils devaient verser aux écoles. La mesure de gratuité a occasionné beaucoup de changements – et pas toujours en bien. Voici ce que j’ai remarqué dans cette école et dans d’autres avoisinantes.

Le comportement des enseignants : pour un salaire réduit, travail réduit

Avant la gratuité, tout était plus ou moins ordonné dans les écoles de la ville de Kinshasa. Les cours commençaient toujours le premier jour de la rentrée scolaire, les enseignants étaient présents au cours de l’année et assuraient régulièrement les enseignements. L’école avait une bonne côte auprès des parents.

Mais aujourd’hui, avec la gratuité de l’enseignement, les enseignants sont devenus négligeant. Pour preuve, les cours n’ont débuté que deux semaines après la rentrée officielle des classes à Kinshasa. Les enseignements ne se donnent plus avec des matériels didactiques comme auparavant. Pire encore, les enseignants donnent les leçons sans volonté d’amener les enfants à comprendre. « Que j’enseigne bien ou pas, j’aurais mon salaire à la fin du mois », m’a dit un enseignant que j’ai rencontré.

Un autre constat amer est que pour compléter leurs salaires, certaines maîtresses vendaient aux élèves de la nourriture pendant les heures de cours. Et, je me suis demandé, comment les enfants pouvaient rester concentrés lorsqu’ils avaient déjà un biscuit, des spaghettis, des saucisses ou des gâteaux en mains ? Cette dernière situation n’est pas forcement l’effet de la gratuité, mais il faut croire que cela a été amplifié par la surpopulation des classes.

Surpopulation des élèves en classe

Avant la gratuité, il y avait entre 30 à 40 élèves dans classes de l’Ecole Primaire Mukasa. Cette année, les salles de classe sont bondées : près de 80 élèves doivent se partager les bancs. Les élèves qui se mettaient deux par banc en sont venus à se mettre à 3 ou 4 sur un même banc.

Dans ces conditions, impossible de suivre convenablement chaque élève et de s’assurer que chacun fait de progrès. C’est d’autant plus grave pour les élèves de 1ère et 2ème année primaire qui ont besoin d’être suivi à la loupe. Lors de mon passage à l’Ecole Primaire Mukasa, j’ai pu interroger quelques élèves qui m’ont raconté qu’ils n’arrivaient pas à terminer d’écrire ce que le maître ou la maîtresse avait mis au tableau que celui-ci ou celle-là avait déjà effacé le tableau.

Gratuité oui, mais qualité !

Ce n’est que récemment que beaucoup de parents ont appris que l’école primaire est obligatoire et gratuite pour les enfants, conformément aux articles 28 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant et 38 de la Loi portant Protection de l’Enfant.

La gratuité de l’enseignement de base est une bonne chose parce qu’elle permet aux enfants de jouir de ce droit fondamental à l’éducation. Mais, il ne suffit pas que l’enseignement de base soit gratuit, encore faut-il que cet enseignement soit de qualité et adapté à toutes les catégories d’enfants. Je plaide pour que le gouvernement prenne toutes les mesures pour garantir la qualité de l’enseignement.

Nelson Mandela disait que l’éducation est l’arme la plus puissante qu’on puisse utiliser pour changer le monde mais à condition de préserver un enseignement de qualité.