Abigaël, 22ans, est une ancienne Enfant Reporter de la ville de Kinshasa. Elle est aujourd'hui étudiante en droit et continue de s'impliquer pour les droits des enfants en encadrant à son tour les Enfants Reporters.

Lorsque j’apprends qu’on faudra interviewer l’artiste Fally Ipupa le jeudi 22 février sous sa casquette d’Ambassadeur de l’UNICEF, je sais tout de suite que j’aurai beaucoup de travail.

 

Il faut trouver des enfants disponibles pour le rencontrer et ces enfants doivent préparer des questions à lui poser. En fait, les questions doivent être assez pertinentes pour le faire parler sans l’embarrasser ou toucher aux sujets qui fâchent.

 

La veille de la rencontre, il fallait proposer les questions et se fixer sur les enfants qui vont être présents. En tout, cinq enfants sont retenus. Il faudrait veiller à ce qu’ils soient tous présents et à l’heure. On se donne rendez-vous le lendemain, au bureau de l’UNICEF.

 

Le jeudi 22 février, les enfants sont présents et le temps d’avance qu’on a sur l’arrivée de Fally nous permet de faire une simulation. Les enfants s’entraînent à poser les questions.

 

S’assurer de la bonne préparation des enfants

 

Alors moi comme encadreuse, je devrais m’assurer que les enfants ne puissent pas s’embrouiller ou perdre leurs moyens devant l’auteur de leurs chansons préférées.

Il faudrait aussi aider les jeunes à supporter la présence de cet artiste qu’ils voient souvent à la télévision.

Certains enfants arrivent à se faire à l’idée qu’ils vont partager le même micro que Fally Ipupa. D’autres en revanche, n’en reviennent pas. Ils sont surexcités.

Deux d’entre elles peinent à tenir en place. Les autres sont aussi contents qu’elles à l’idée de rencontrer celui dont ils connaissent les chansons par cœur, mais ils le montrent moins.

À quelques minutes de l’arrivée de Fally, le stress de l’une des filles atteint son paroxysme.

Elle me parle de sauter sur l’artiste à son arrivée. Je me demande ce qu’il en sera face à l’artiste qui ne va pas tarder à faire son entrée.

Quand elle en parle, elle a les mains qui tremblent. Plus le temps passe, plus elle réalise qu’elle sera vraiment avec Fally, qu’elle ne voit qu’à la télé.

Pour moi son encadreuse, c’est un peu inquiétant. Je crains qu’elle ne perde ses moyens à cause de son enthousiasme. Mentalement, je me prépare à toute éventualité.

 

Du mal à se contenir face à Fally

 

Lorsqu’on annonce l’arrivée de Fally, je vois certaines perdre leurs moyens parmi les adultes. Parmi les enfants, ce n’est pas trop différent. Certains enfants ne savent pas s’ils doivent crier ou garder son calme. L’un des enfants est particulièrement aux anges.

Dans le cadre qui leur sert de plateau pour l’interview, l’enfant est assis à côté de Fally.  Je sens la situation se complique dans la gestion de ses émotions.

Submergé, l’enfant oublie sa question et se ressaisit par la suite après les encouragements de Fally. Il effleure son épaule pour la soutenir. Le geste est réconfortant et illumine le visage de l’enfant.

 

Le sourire de l’enfant montre qu’il est hors de lui. Les larmes remontent et perlent sur ses joues. Émotions ? Tensions ? Les deux en même temps ? L’enfant demande à Fally quel conseil il pourrait donner aux jeunes, en partant de son vécu. Sa voix peine à être audible. Fally est sûrement conscient de l’effet qu’il lui fait, il commence par plaisanter avant de répondre. Il feint de ne pas savoir si en utilisant le mot “histoire”, l’enfant voulait parler de sa vie amoureuse ou professionnelle.

Alors sa réponse, pour moi, c’est un coup de cœur.

Il parle de ne pas oublier d’où on vient. Fally commence par le dire en lingala avant de le redire en français.

Il pense que « qui que l’on devienne, on ne doit pas oublier d’où l’on vient. Ça permet de rester conscient ».

 

Effet inspirant de Fally sur les enfants reporters

Après l’interview, on annonce une photo de Fally avec les enfants. Chacun s’arrange pour être le plus près de Fally possible.

Pour moi, c’était déjà la fin de la cérémonie mais pas la fin de mon travail. Je pouvais être tranquille et passer à autre chose : la production des textes qu’ils vont envoyer. Les enfants reporters ont fini et tout s’est bien passé. Je leur rappelle qu’ils doivent m’envoyer des textes de ce qu’ils ont aimé de la journée. Pour une fois, ils ont été tellement rapide. Probablement l’effet Fally a donné plus d’inspirations aux enfants.

Au revoir Fally et à la prochaine.