Abigaël, 22ans, est une ancienne Enfant Reporter de la ville de Kinshasa. Elle est aujourd'hui étudiante en droit et continue de s'impliquer pour les droits des enfants en encadrant à son tour les Enfants Reporters.

Il n’est pas normal qu’un enfant ne puisse pas avoir droit à l’information à l’ère du numérique. Je suis Abigaël Mwabe, jeune reporter. Alors, ce mercredi 14 juin, j’assiste à une réunion préparatoire de la journée du 16 juin. Le but de la réunion est de concevoir un mot pour la journée mondiale de l’enfant africain. Parce que pour cette journée, les enfants veulent prendre la parole.

Cette année, le thème touche le numérique. En fait, cela me rappelle que le 14 octobre de l’année passée, j’ai assisté à la matinée scientifique sur l’accès universel à l’information à l’ère du numérique. La journée a été organisée par l’Unesco et ses partenaires au centre Wallonie Bruxelles à Kinshasa à l’occasion de la journée internationale de l’accès universel à l’information.

« L’information, on doit la recevoir. Et on doit la recevoir librement par plusieurs canaux différents pour éviter d’être endoctriné. Et cette information, non seulement on doit nous la donner, mais à notre tour, on doit la transmettre », avait indiqué le professeur Kodjo Ndukuma, expert en droit numérique.

L’information donne du pouvoir

 

Pendant les échanges d’aujourd’hui pour la préparation de la journée du vendredi 16 juin, on essaie de citer les droits de l’enfant qui pourraient être liés au numérique. On en cite plusieurs. L’éducation, la participation, etc. Presque tous les droits sont cités. À mon avis, il en manque un : celui à l’information.

Encore une fois, je constate que l’enfant est tellement privé d’information, qu’il n’a pas à l’esprit que c’est un droit qui lui revient. Alors qu’aujourd’hui, le numérique offre tellement de possibilités pour que les enfants puissent avoir accès à une information de qualité.

Et pourtant, les enfants qui parlent aujourd’hui passent à côté de cet élément qui est important pour sa formation, son développement. J’ai aussi appris que « l’information confère le pouvoir ».

Ce que je vois en regardant la scène de la réunion de préparation de la journée de l’enfant africain, c’est un avenir qui retombe dans les mêmes erreurs pour avoir ignoré son passé. Pour connaître son passé, il faut avoir accès à l’information. Je dis que, c’est ce que je vois. Peut-être que plus tard, je pourrais changer d’avis.

A la fin de la séance de rédaction du plaidoyer produit par les enfants, Je réalise qu’à aucun endroit on ne fait le lien entre le numérique et le droit à l’information.

Malheureusement, j’oublie de le dire. Mais en fait, je me demande si la jeunesse congolaise ou l’enfant congolais a conscience de l’importance du numérique aujourd’hui et du poids de l’information. C’est à peine qu’on en parle même dans les écoles. Le numérique n’est pas ce dans quoi on investit pour la formation des enfants. Ailleurs on parle de l’éducation au numérique, mais l’enfant est encore loin de ces considérations. On parle vite des problèmes, pas ceux qui sont réels ou flagrants. Mais, chaque jour on parle des problèmes qui peuvent nous empêcher de faire ce qu’on veut.

La destruction de la communication 

 

On cite le fait par exemple, qu’internet n’est pas accessible à tous. Et en prévision des solutions pour permettre à tout le monde d’y accéder, on devrait rendre la connexion gratuite. On évoque notamment la suppression définitive des forfaits et la nécessité de data pour accéder à internet. Je me demande qui payera pour ça ? Si vous consommez sans payer, c’est sûr qu’il y a quelqu’un qui paie. Je suis convaincu que les opérateurs téléphoniques ne l’accepteront certainement jamais.

Quoiqu’il en soit, moi, je pense, que le numérique aujourd’hui est aussi mauvais qu’il est bon. Il permet de faire évoluer certains domaines et d’acquérir un certain nombre de connaissances. Il y a aussi des problèmes comme le cyberharcèlement, dépravation des mœurs, paresse, etc. Pour moi, il facilite autant l’évolution, l’avancement de la jeunesse, que sa destruction ou sa chute, selon l’usage qu’on en fait. Alors, il faudrait voir comment apprendre aux jeunes de tirer le meilleur du numérique.

Avec le numérique et les smartphones dans les familles, la communication interpersonnelle a pris un sacré coup. Il n’y a qu’à voir dans combien de maison le mot « dialogue » a encore son sens. Chacun est dans son coin avec son téléphone et on ne s’adresse plus assez souvent la parole. Il faut promouvoir la communication et l’information comme l’un des droits importants dont l’enfant doit jouir à l’ère du numérique.